Écrire comme on travaille la terre. Transformer le monde dans un geste qui transfigure le politique en poétique. Une conviction habite ce premier recueil de Benoît Sibille : la figure originaire du poète se trouve moins dans l'esthète que dans celle de « l'homme réel, en chair et en os, campé sur la terre solide et bien ronde » dont l'action s'exerce sur le matériau de la langue. Le contact avec les choses conduit au contact avec la page, dans une transaction répondant à un besoin unique, vital – simplement humain : dire poétiquement l'effort qui incarne.
Écrire la poésie dont on a besoin
battre les mots comme on battait le blé
y chercher un grain qui nourrisse
Le poème substantiel
celui qui apaise la faim
se refuse
Pourtant tout chante
écrire pour savoir écouter.
Benoît Sibille est docteur en philosophie et enseigne à l'Institut Catholique de Paris.