Les poèmes de Paul Guillon nous
font redécouvrir l'Incarnation ; non pas
seulement en l'habillant de costumes modernes,
comme cela s'est beaucoup fait depuis Péguy,
mais en nous la montrant comme une aventure,
un risque à courir pour le disciple et pour le
maître avant lui.
Dans le merveilleux poème
« Les voisins en sourient parfois… », nous voyons
Jésus en grand garçon célibataire vivant encore
avec sa mère, passant ses journées à l'atelier, et
« la lampe à huile brûlant tard dans la chambre
nocturne ». Cette familiarité-là s'acquiert en le
suivant sans oeillères, le regard jeté de temps en
temps, comme le sien, « sur les blés qui lèvent,
les oiseaux qui ne sèment », et aussi sur « cette
forme recroquevillée dans une couverture / qui
meurt à petit feu sur un gril de hasard ».
Jésus nourrissait ses paraboles
de ce qu'il croisait dans les champs, les villages. À son exemple, Paul
Guillon nourrit ses poèmes de ce qu'il rencontre dans la rue, les musées,
les hôpitaux, ou sa chambre, avec l'audace de tout voir et de tout dire.
Son vers « au rythme bancal » est capable de tout accueillir sans perdre
un équilibre et même une paix qui lui viennent d'une intimité partagée
avec celui qui forme patiemment son coeur.
C'est ainsi que la vie cachée
s'éclaire pas à pas ; c'est ainsi qu'un disciple devient au jour le jour un
authentique poète.
Jean-Pierre Lemaire
Paul Guillon est né à Paris en 1973. Après des études à Sciences Po et une agrégation
d'Histoire, il a enseigné plusieurs années en région parisienne et collaboré à différentes
revues littéraires et à Communio. Il vit désormais à Bruxelles. La vie cachée est son
deuxième recueil.