Ces 31 lettres d'Hadewijch d'Anvers, béguine flamande du XIIIe siècle, représentent le chef d'oeuvre de la mystique dite « exemplariste ». Pour Hadewijch, la raison d'être de Dieu et de ses créatures est l'Amour, qui « pousse » Dieu à s'épandre d'abord en Trinité, puis dans la Création, pour toujours plus aimer. Quel intérêt peut présenter aujourd'hui le mouvement béguinal du XIIIe siècle? Ceci, que malgré la profession monastique d'une partie de ses représentants il est laïque et est marqué par la prédominance de l'élément féminin. Il l'est aussi par l'emploi tout nouveau en ce domaine de la langue vulgaire : l'expression plus spontanée va de pair avec une libération du sentiment et de l'intuition. Il rejoint aujourd'hui le meilleur du courant charismatique et témoigne qu'en dépit de l'éloignement des âges et de la différence des contextes culturels, le même Esprit anime l'Eglise et est toujours à l'oeuvre pour renouveler et à actualiser la vie de Dieu dans les âmes. Le propos de réforme et de ressourcement, qui anime la pensée et le comportement religieux, ne sera vraiment tel que s'il reprend pour son compte cette manoeuvre inspirée : l'aggiornamento ne sera ouverture au jour éternel que s'il est redécouverte de la vie contemplative. De ce loisir, plus précieux que toute oeuvre, que Hadewijch loue magnifiquement, et fièrement, dans ses lettres.